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L'onde...
Un jour, j’avais évoqué, au travers de ces même pages, que certaines rencontres étaient comme les rides, au fil de l’eau. A glisser et s’effacer en silence, sans le souffle d’un sentiment… Je croyais même que certaines autres subsistaient et existaient au-delà de l’onde, que leurs images restaient, à jamais préservées dans la mémoire de l’eau. Et que jamais elles ne nous quitteraient, et nous suivraient éternellement, illuminant de leurs éclats le sens de nos vies.
Aujourd’hui, je ne sais plus.
Hier, en errant en ville avec une amie, j’ai croisé Jade et son homme, à la sortie d’un parking. Ils ne m’ont pas vu. J’ai feins un pas, puis hésité, et finalement reculé. Qu’aurais-je eu à leur dire, sur le moment ? A vrai dire, sur l’instant, ma seule pensée fut qu’il avait de la chance, lui, d’être si grand, et de pouvoir glisser son bras derrière la nuque de Val, comme le font certaines personnes lorsqu’elles sont amoureuses… Les quelques centimètres d’écart qui nous différenciaient en taille m’avaient toujours empêché de tenter ce genre de marques d’affection, et j’en étais contraint à enrouler mon bras autour de sa taille, pour ne pas ressembler plus encore à un gnome sautillant à ses cotés, ou un pin’s maladroitement accroché à sa robe.
Mais voilà. Ce fut tout, la seule, l’unique pensée qui m’accabla à cet instant. Pour deux personnes que je detestais la semaine précédente, cela me parut bien peu de choses. Et bien pire encore. Je ne vis pas le visage de Valérie, dissimulé dans l’ombre de ses longs cheveux. Mais je distinguai parfaitement celui de Sébastien. Et il me sembla ne pas le reconnaître. Il me semblait… étranger. Comme l’un de ces visage, que l’on croise, que l’on observe un instant, et que l’on oublie… Quelconque et anonyme.
J’ai eu peur à ce moment.
Peur de ces rides, qui s’effacent, sur la surface de l’onde.
Je crois qu’une situation, pour la première fois, m’a vaincu. Qu’elle a vaincu mon âme et mon cœur, mes principes, et mon humanité. Je crois qu’une situation, pour la première fois, m’a réellement blessé. Blessé au point de rayer de ma vie une personne que je connaissais depuis cinq années. Jamais n’avais-je ressenti une telle sensation.
Il y a trois mois encore, je demandais à Valerie et Aurore de s’occuper de l’un de mes amis. Il venait d’arriver sur Toulouse, alors que je partais vacances, et ses autres connaissances devaient aussi s’absenter pour quelques semaines. Alors, pour qu’il ne regrette pas d’avantage d’être parti de la capitale en y laissant son amour, je l’introduisis dans le groupe. Pour cet ami, j’aurais donné mon âme et vendu mon coeur, quelques semaines auparavant.
Et hier, il était là, devant moi, à quelques pas à peine. Et à mes yeux, il n’était plus personne.
Je tachais de chasser cette pensée. A quoi bon… a quoi bon se brouiller, renier des amitiés pour une affaire de « femme » ? A quoi bon oublier des souvenirs, des complicités et tant de moments, pour une affaire de cœur ? Elles viennent et passent. Il y en a eu, et il y en aura d’autres.
Oui, mais voilà : Je comprenais enfin. Ce n’était plus tant sa relation, toute cette histoire, qui me gênait. Mais il avait simplement, en quelques semaines, rompu et brisé tous les principes auxquels j’étais attaché. Tout ce en quoi je croyais, et pour quoi je vivais. Les uns après les autres, tous avaient volés en éclats. J’étais perdu. J’avais l’impression de vivre dans un monde, qui, tout entier, se moquait de moi et violait mes sentiments. Jugé au tribunal du ridicule, et de l’égoïsme… Alors je repensais à ces histoires. Chrystel, ou Bouchra ou bien d’autres. D’autres temps, d’autres scénarios, mais le même fond : Se donner aveuglement, et se faire marcher dessus. Sans comprendre ...
Finalement, j’ai sans doute saturé, et explosé. Sébastien, l’ami, a été la victime de ma conscience. Première victime. Repose en paix.
Mais voilà.
Je déteste perdre. Je veux lutter. Je ne veux pas sombrer dans ce bourbier d’inhumanité, où se mêlent égoïsmes et ressentiments. Cette fange qui nous sert de monde. Je refuse de devenir un non-homme, de perdre ce qui fait de moi ce que je suis, et qui fait ma force. Je ne veux pas devenir un loup, je veux rester moi même. Que Sébastien soit aujourd’hui un inconnu, je n’y puis plus rien. Mais jamais je ne refuserai qu’il redevienne un ami.
Ecrit par RolTom, le Mardi 24 Juin 2003, 23:10 dans la rubrique "Rol".
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